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mardi 29 avril 2025

Le luxe doit prendre le virage de la circularité

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Pour la première fois depuis 2016, en dehors de 2020, la création de valeur dans le secteur du luxe devrait être inférieure à celle de l’année précédente. Un coup de frein qui vient mettre un terme à une période de création exceptionnelle entre 2019 et 2024, durant laquelle les profits ont triplé avec un taux de croissance moyen de 5 % chaque année. S’agit-il d’un simple ralentissement ou de l’aube d’un changement de paradigme plus profond ? Réponse de Clément Chenut, auteur de l’ouvrage Génération circulaire, qui accompagne les dirigeants dans la transition durable, notamment par la circularité.

Le luxe est aujourd’hui en quête de sens. Les années post-Covid ont connu une croissance incroyable, notamment des prix, mais le storytelling ainsi que la qualité ont été oubliés. Il faut aujourd’hui repenser la proposition de valeur pour créer de l’attachement et de la fidélité. Cela implique de mettre en place une stratégie personnalisée par segment de clients, notamment ceux qui sont le moins sensibles aux fluctuations économiques, à savoir les beyond money. Selon le rapport du Boston Consulting Group, les beyond money, qui représentent les 0,1 % les plus aisés de la population mondiale, dépensent en moyenne 350 000 € par an dans le luxe. Leur part dans les revenus pour le secteur est passée de 12 % à 23 % entre 2013 et 2023. Ils valorisent la qualité des produits et les savoir-faire artisanaux (89 %), considèrent que la singularité du luxe se trouve dans l’exclusivité et l’authenticité (85 %)et sont majoritairement à la recherche d’expériences personnalisées. Alors que l’univers du luxe est un laboratoire d’innovation, où l’on peut expérimenter de nouvelles technologies, matières, design, les nouveaux paradigmes (environnement, bien-être, exclusivité, etc.)sont l’opportunité de renforcer les valeurs du luxe en s’appuyant sur les forces d’hier en les nourrissant des valeurs d’aujourd’hui et de demain. L’économie circulaire, qui vise à optimiser l’usage des matériaux en générant de la valeur sur tout le cycle de vie – et pas seulement sur la production – permet de répondre à ces attentes client. Comment ? Accroître la désirabilité passe par la rareté, ce qui implique de produire moins, mais mieux.

L’héritage, nouveau narratif du luxe

Au-delà des bienfaits environnementaux de la circularité, la mise en place de ce modèle d’affaires représente trois bénéfices majeurs pour les entreprises de l’industrie du luxe. Tout d’abord, des matériaux biosourcés certifiés, voire issus d’exploitations régénératives, pour une qualité d’exception. Aujourd’hui, cette qualité ne provient pas seulement de la matière, mais aussi des procédés qui permettent de la produire et de l’approvisionner de la manière la plus vertueuse possible pour protéger notre patrimoine naturel. L’enjeu est donc de collaborer et d’accompagner les fournisseurs vers ce nouveau cadre de production par la certification. Pour le cuir, plusieurs leviers d’innovation existent entre les exploitations animales régénératives et les matériaux de substitution (cuir végétal et végan).

Préserver les savoir-faire

Deuxième bénéfice, des savoir-faire uniques pour générer l’attachement des clients par une expérience exclusive. Cette dernière doit s’appuyer sur les meilleurs artisans locaux. L’enjeu est de préserver les savoir-faire de production tout en en développant de nouveaux (exemple : autour des métiers de la réparation, de l’entretien et de l’ennoblissement) et de déployer des chaînes logistiques facilitant ces services. De la même manière que le travail manuel permet de produire un bien d’exception, le savoir-faire des artisans doit aujourd’hui être mis au service de la circularité pour proposer encore plus de valeur autour d’un même produit. L’intérieur en soie d’un gant en cuir peut par exemple être remplacé avec dextérité pour le remettre à neuf.

Des conseillers clients « augmentés »

Troisième bénéfice : l’expérience ne prend forme que via des relations exclusives, grâce notamment à des conseillers client « augmentés » par le numérique, la data et l’IA. L’enjeu est d’anticiper les besoins d’achat et de remise à neuf, ou encore d’activer des campagnes marketing exclusives vis-à-vis de collections conçues avec des produits circulaires. En d’autres termes, la proposition de services personnalisés tout au long du cycle de vie permet un accompagnement des clients sans frontière dans la durée.

Clément Chenut, fondateur de Chistera Advisory.

L’économie circulaire, un levier d’innovation

Par essence, les produits de luxe sont durables puisqu’ils ont vocation à être transmis. Mais sont-ils encore souhaitables dans un enjeu de raréfaction de la ressource ? Et assez rares et exceptionnels pour générer l’envie des clients ? La circularité est le moyen de concilier ces défis. Loin de se cantonner à la gestion de déchets, l’économie circulaire est un levier d’innovation qui permet d’ouvrir sur un nouveau luxe en proposant un produit et une expérience encore plus uniques et distinctifs. Tout comme la F1 est la locomotive de l’innovation pour les véhicules grand public, le luxe doit prendre le virage de la circularité. C’est sa responsabilité pour le reste de la filière.

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